Puits de carbone

Puits de carbone - Projet Peugeot

Naudet, pionnier dans la réalisation de puits de carbone

Qu'est-ce qu'un puits de carbone ?
Le cycle du carbone

Elément primordial de l'écosystème planétaire, le carbone constitue un stock global et fixé qui se répartit entre l'atmosphère, les océans et les continents, suivant un cycle dicté par des échanges permanent entre chacun de ces "réservoirs".

Rôle du gaz carbonique en tant que gaz à effet de serre 
Dans l'atmosphère, il est présent sous forme de gaz carbonique (ou dioxyde de carbone, CO2), et joue un rôle essentiel en tant que gaz à effet de serre, puisqu'il absorbe (avec les nuages, la poussière et certains autres gaz) les rayonnements infrarouges émis par la réflexion du rayonnement solaire sur le globe. Cet effet assure au climat terrestre une température moyenne clémente (15°C au lieu de -18°C).

Equilibre naturel des échanges de carbone 
Les échanges de carbone entre l'atmosphère et les continents se produisent principalement via la respiration des organismes vivants (qui relâche du gaz carbonique,) et la photosynthèse végétale (qui fixe ce dernier pour constituer de la matière organique). 
Au cours de la longue histoire de la Terre, le réservoir continental a accumulé une quantité de carbone (estimée à trois fois celle présente dans l'atmosphère), via les processus de décomposition et de fossilisation qui sont à l'origine d'une immobilisation de longue durée sous forme de charbon, gaz et pétrole.

Effet de serre et changements climatiques

Depuis le début de l'ère industrielle, la combustion de plus en plus importante de carbone fossile, ainsi que la déforestation, constituent une source permanente d'accroissement du CO2 atmosphérique (+20% en moins de 50 ans). D'où la question de l'augmentation de l'effet de serre et la perspective d'un réchauffement climatique, aujourd'hui reconnue par la communauté scientifique et qui entraîne des risques majeurs : 
- élévation des températures de +1,4 à +5,8°C, 
- phénomènes météorologiques extrêmes accentués (ouragans, tempêtes, sécheresses, inondations…), 
- fonte des glaciers continentaux, 
- élévation du niveau des océans de 9 à 88 cm, 
- difficultés d'adaptation des formations végétales (cultures, milieux naturels…) à l'évolution trop rapide des climats, 
- impacts épidémiologiques (modification de la virulence et des zones d'infestation de pathologies, virus).

Solutions retenues pour la diminution de l'effet de serre

La prise de conscience des risques induits par l'augmentation des gaz à effet de serre et le caractère mondial de cette problématique ont conduit la communauté internationale à se mobiliser. Ainsi, la Convention cadre sur les changements climatiques, lancée au Sommet de Rio en 1992, est entrée en application le 21 mars 1994. Elle a été signée par 178 États, plus l'Union européenne.

Lors de la conférence de Kyoto (ci-dessous, protocole de Kyoto) en 1997, un protocole a été adopté par lequel les pays développés s'engagent sur des objectifs quantifiés - juridiquement contraignants - et un calendrier de réduction d'émission de gaz à effet de serre. La conférence de Johannesburg de septembre 2002 a signifié la mise en application des accords de Kyoto.


Les actions susceptibles de réduire l'excédent de rejets constaté (de l'ordre de 2 Gt ou gigatonnes) sont de trois types : 
1. la réduction des émissions en provenance de la combustion des énergies fossiles 
2. la réduction de la déforestation 
3. le développement de mécanismes de fixation du carbone: les "puits de carbone"

Les forêts, les puits de carbone et l'effet de serre

Les forêts constituent d'importants stocks de carbone. Les forêts absorbent naturellement du CO2 en phase de croissance et stockent ce carbone dans le bois et les sols. Augmenter les surfaces forestières et utiliser le bois comme écomatériau permet de séquestrer du carbone prélevé dans l'atmosphère et de créer de nouveaux "puits de carbone".

A la base, la photosynthèse

Mécanisme fondamental du monde vivant, la photo-synthèse est une réaction biochimique qui transforme schématiquement des molécules d'eau et de gaz carbonique (CO2) en molécules d'oxygène (O2) et de glucides (matière organique), grâce à l'énergie lumineuse. Les arbres synthétisent ainsi du bois, qui stocke durablement du CO2 prélevé dans l'atmosphère. 
Une forêt naturelle en équilibre maintient un important stock de carbone dans la biomasse aérienne (feuilles, branches, troncs, arbustes, plantes, litière…), dans la biomasse souterraine (racines…) et aussi dans les sols (matière organique, humus…).

Effet "puits de carbone"

Une forêt en croissance stocke efficacement du CO2

Le bilan annuel d'une forêt mature en terme d'absorption de CO2 est très faible car la fixation de CO2 par photosynthèse est compensée par les rejets de CO2 dus aux processus de décomposition de la matière organique (micro-organismes, champignons, insectes…). C'est pendant la phase de croissance qu'une forêt reconstitue son stock de biomasse. Grâce à la photosynthèse, elle fonctionne alors comme une véritable "pompe à CO2" qui stocke dans le bois et les sols le CO2 atmosphérique, d'où l'appellation "puits de carbone".

Créer des puits de carbone par reforestation

La reforestation permet d'installer de nouvelles forêts qui vont activement fixer du CO2 pendant leur croissance. Selon la disponibilité des terres aptes aux boisements, l'homme peut ainsi créer de nouveaux "puits de carbone" et agir concrètement pour réduire significativement le taux de CO2 dans l'atmosphère. Outre ce bénéfice, la reforestation présente aussi des avantages induits importants, en terme de reconstitution de la biodiversité, de protection des sols ou des ressources en eau et de développement local.

Notre expérience au Brésil

Les pépinières Naudet ont mis en place et développé le puits de carbone du constructeur automobile Peugeot, en collaboration avec l'Office National des Forêts et l'ONG Pro Natura.
Ce projet, représentant un investissement pour Peugeot de plus de 65 millions de FF (près de 10 millions d'euros), avait pour objectif de " démontrer la faisabilité de la fixation de carbone atmosphérique via une plantation d'arbres ", et ainsi contribuer aux réflexions liées à la mise en œuvre des accords sur la réduction de l'effet de serre.
Aujourd'hui achevé, ce projet nous a permis de démontrer notre réactivité, notre faculté d'adaptation et notre compétence pour la réalisation de pépinières sur tout type de terrain et pour toute espèce d'arbres, et la plantation dans toute région du monde.

Faits et chiffres

Situation : Sud de l'Amazonie, communes de Juruena & Cotrigaçu
Surface : 13 000 ha
Nombre d'arbres plantés : plus d'un million
Objectifs du client
- Séquestrer 2 millions de tonnes de carbone, soit 7,32 millions de tonnes de CO2
- Promouvoir la biodiversité en travaillant avec plus de 30 espèces natives 
- Assurer une intégration dans le tissu socio-économique local
Calendrier :
- Septembre 1998 : signature du contrat 
- Décembre 1998 - juin 1999 : construction de la pépinière à Juruena 
- Mars 1999 : travaux d'équipement 
- Septembre 99 - mars 2000 : 1ère saison de plantation (552 000 plants mis en terre, 30 espèces utilisées) 
- Février 2000 : début des plantations chez les petits propriétaires 
- Septembre 2000 - mars 2001 : 2e saison de plantation (188 000 plants mis en terre, 15 espèces utilisées) 
- Septembre 2001 - mars 2002 : 3e saison de plantation (400 milliers de plants)

Description technique du projet

La pépinière de Juruena

La pépinière du projet a été créée ex-nihilo de décembre 1998 à juin 1999 sur le territoire de la commune de Juruena située à environ 1000 km au nord-ouest de la capitale du mato-Grosso. Elle s'étend sur une surface de 3 hectares pour une capacité installée de production d' un million de plants par saison.

L'aire d'extension présente des caractéristiques physiques propices à la production de plants : sol perméable, réserve en eau suffisante associée à un bon drainage lui-même favorisé par la douce déclivité du terrain. Des infrastructures ont été créées en vue de maîtriser la chaîne globale du processus de production de plants : bureaux, aire de stockage de produits phytosanitaires, substrat et récipients (caisses), germoirs et lignes de plants suspendus, système d'irrigation par aspersion et ombrières pour contrôler finement l'eau et la lumière.

Dans la région, cette pépinière se distingue des autres par une capacité installée élevée de production (1 million de plants pour une moyenne régionale de 150 à 200 000 plants / pépinière), des infrastructures complètes, ainsi qu'une production assise sur des essences natives (plus de 30 essences natives différentes, pour 5 à 6 dans les autres pépinières).

Deux étapes de production : la récolte et la production des plants

La production de plants est une étape cruciale pour le succès d'un reboisement. De la qualité des plants produits dépendra largement le taux de réussite de la plantation. Le soin apporté aux phases de récolte et de mise en pépinière sont à cet égard tout à fait déterminants. 


La phase de récolte 

Dans le contexte de Juruena la mise en œuvre de la récolte a nécessité un travail important du fait de l'absence initiale de données de bases (pas de vergers à graines, ni de suivi de reboisement). 

La première étape a consisté à dresser la liste des espèces à produire fondée sur des critères pré-établis : adaptation au milieu (climat, sols et végétation existante), valeurs environnementales et économiques fortes, le dernier critère s'inscrivant dans une perspective de développement durable. Ces premiers critères nous ont amené à travailler essentiellement avec des essences natives de la région. 

La deuxième étape, c'est-à-dire la reconnaissance des arbres porte-graines (arbres sur lesquels on récolte les graines) et la récolte elle-même a requis la mise en place d'un réseau très structuré basé prioritairement sur le retour d'expérience d'acteurs locaux : communautés indiennes voisines du projet, services municipaux de l'agriculture, petits propriétaires et exploitants forestiers. Aujourd'hui il existe un véritable réseau de cueilleurs de graines avec des provenances identifiées, qui ont trouvé dans cette activité saisonnière un revenu complémentaire appréciable. 

Une fois récoltées, les graines sont stockées à la pépinière puis rapidement utilisées. En effet, le stockage de graines en milieu tropical est une tâche ardue et le pouvoir germinatif des graines après leur récolte diminue souvent très vite. 


La phase de production des plants 

La phase de production des plants comprend trois étapes : préparation des graines, germination en germoirs et enfin, repiquage. 

- La préparation des graines consiste à les traiter pour accélérer le processus naturel de " levée de dormance " qui permet la germination des graines. Ces traitements sont effectués par des procédés connus dans la littérature ou étudiés expérimentalement à la pépinière de Juruena : trempage dans de l'eau chaude, scarification du tégument (c'est-à-dire incision de la peau superficielle de la graine) ou encore, traitement à l'acide. 

- La germination (dans un lieu ad-hoc appelé germoir) se produit au sein d'un milieu de culture aseptisé constitué le plus souvent de sciure de bois ou de sable associé à un traitement par fongicides. 

- Le repiquage consiste à réinstaller les graines germées dans des récipients remplis d'un substrat nutritif afin de les éduquer en régulant les éléments nécessaires à leur bonne croissance. Ces éléments à réguler finement sont l'eau, mise à disposition en tant que de besoin par le réseau d'irrigation, la lumière avec un passage progressif de " la pleine ombre à la pleine lumière " (processus dit de " rustification " mis en œuvre grâce aux ombrières), les nutriments (pour la fertilisation), et les parasites (traitement anti-parasitaire).

Deux choix à fort impact : le substrat et le récipient d'accueil des plants

Les choix de l'équipe projet sur le substrat d'éducation des plants en pépinière et les récipients les contenant ont été guidés par des considérations techniques et pratiques. 

Le substrat choisi est constitué d'un mélange de substrat minéral afin d'assurer une structure physique adéquate, de résidus organiques locaux pour garantir une bonne teneur en nutriments et de la terre locale afin d'assurer une bonne mycorhization des plants. Les mychorizes sont des associations symbiotiques entre un champignon et un arbre, présents à l'état naturel dans la terre et qui ont la propriété en s'associant aux racines des végétaux de favoriser leur croissance. Ils agrandissent les surfaces de contact avec le sol et par là-même facilitent l'alimentation du végétal. 

Pour le récipient, le choix s'est porté sur des caissettes contenant 24 unités de 400 cm3 en plastique dur. Le volume choisi permet de produire des grands plants nécessaires pour résister à des milieux hostiles à l'installation d'espèces forestières (comme les pâturages de la Fazenda Sao Nicolau). Le plastique dur de forme quadrangulaire " anti-chignon " diminue les risques d'enroulement des racines et le système de caissettes facilite le transport et la manutention des plants.

La Fazenda Sao-Nicolau : théâtre de déploiement du projet

La Fazenda Sao Nicolau, jouxte le rio Juruena, l'un des multiples affluents secondaires du grand fleuve Amazone. Elle se situe à 1 heure et demi de piste de la pépinière de Juruena sur le territoire de la commune de Cotigaçu. La propriété a été achetée par ONF Brasil en mars 1999 à un fazendero de la région qui souhaitait s'installer dans une fazenda déjà ouverte de l'état du Parana. 

L'achat de la propriété n'a donc pas entraîné de phénomène de " leakage " (qui préoccupe à juste titre les opposants au concept de puits de carbone) puisque le précédent propriétaire n'a pas défriché un nouveau territoire forestier pour installer sa nouvelle activité. Cet achat a été précédé d'analyses pédologiques (étude des sols) permettant de déterminer le potentiel de la propriété pour un chantier de reboisement. 

La Fazenda Sao-Nicolau couvre une surface de 10 000 hectares soit une fois et demi Paris " intra-muros ". Elle est constitué de 7 500 hectares de forêt naturelle, de 2 000 hectares de pâturages d'âge divers et de 500 hectares de ripisylves (forêt en bordure de rivière) plus ou moins dégradées. 

L'aire de reboisement de cette partie initiale du projet est donc constituée par l'ensemble des pâturages et la partie dégradée des ripisylves, soit une surface totale 
de 2 200 hectares. En raison de la diversité de ses habitats, la propriété abrite une riche biodiversité.

Des techniques de plantation et d'entretien douces

Alors qu'au début du projet des moyens relativement lourds avaient été déployés pour assurer la plantation, le projet a rapidement décidé de se recentrer sur des techniques de plantation et d'entretien douces, accessibles localement et génératrices d'emplois en vue de renforcer son intégration locale. 

La préparation des sols est réalisée de manière mécanique par l'entreprise Française EDEA dirigée par M Régis ROLLAND. A titre d'exemple une technique utilisée est "l'andainage" qui consiste à réunir par lignes les résidus parfois volumineux (essentiellement troncs d'arbres) issus de la dégradation du biotope original par l'exploitation intensive pour l'élevage de l'ancien propriétaire. Cette opération est hors de portée de la simple force physique humaine et donc tout naturellement réalisée mécaniquement. Une fois l'andainage réalisé ont dispose de larges surfaces utilisables pour un chantier de reboisement.

La plantation est totalement manuelle. Elle est réalisé par des ouvriers agricoles engagés dans la région dans le cadre de contrats saisonniers. Des bâtiments ont été construits afin de recevoir le personnel dans de bonnes conditions de confort. La saison de plantation dure de début octobre à fin avril, ce qui correspond à la saison des pluies. A cette saison les quantités d'eau enregistrées sont très importantes et permettent tout à la fois la croissance des plants récemment introduits, ainsi que leur résistance à la longue saison sèche. Au plus fort de la saison de plantation le projet emploie 75 ouvriers agricoles à la Fazenda. 

L' entretien est semi mécanique. Parmi les opérations d'entretien l'une des plus importantes est le désherbage des zones de plantations. Les herbes exotiques introduites dans le milieu (bracaria et colonia) par l'ancien exploitant agricole sont des espèces très vivaces que l'on peut même qualifier de " peste végétale ".

 

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